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Mots et images de Joe Krapov
18 février 2017

LES PAYS QUE PARCOURT LE VENT (renku du pays de Lannion)

Dans le forum Télérama Lartigue de fin 1998, les choses sont un peu plus compliquées : il faut partir d'une première photo de Jacques-Henri Lartigue et arriver dans la deuxième ou, plus largement, passer de l'une à l'autre.
Dans le petit recueil que j'avais tiré de mes contributions j'avais fait l'exercice trois ou quatre fois à partir de deux couples de photos. Mais j'ai retrouvé hier les séries 3, 4 et 5 que je n'avais pas imprimées et que j'avais quasiment oubliées. Ce texte-ci est ma contribution à la troisième série.

N.B. En poésie japonaise un renku est une suite de tankas, le tanka étant lui même un haïku suivi de deux vers de sept syllabes.

 

Scan réduit 99-01-06 1 Guitty (Marguerite Bourcart) à Biarritz 1905 Lartigue

Sur la grande plage,
Beg Leger, près de Lannion,
Nous allions, enfants.

Papa nous photographiait :
C'est un homme de mémoire.

Nous écrivait-il
Déjà ses poèmes fous
Qui nous font tant rire ?

Nous y allions en hiver,
A Toussaint ou bien à Pâques.

A la Sabotière,
Une bonne crêperie,
Nous nous endormions !

Il avait beau mitrailler,
Je fuyais son objectif

Fort distraitement
J'écoutai plus tard ses oeuvres
Franco-japonaises

J'étais la fille de l'air,
Lui l'amoureux de la mer

"Le vent entre dans
Le détroit de Gibraltar
Toujours par la gauche"

Il n'aimait pas les avions :
Il avait trop le vertige !

"Le vent examine
La rue des amours perdues
Sans rien y chercher"

J'étais faite pour les airs
Lui, amoureux de ma mère

"Le vent s'emplafonne
La nuit contre ce pilier
Où le zouave attend"

C'était quand l'inondation ?
Mil' neuf cent six ? ou bien dix ?

"Le vent parcourra-
-t-il, sous les jupes des filles
Un pays interdit ?"

Plus tard j'ai quitté le nid
J'ai pris un splendide envol

"Le vent fait frémir
La surface des rizières
Mais le grain germera"


L'aviatrice a fui au loin

Ils sont restés seuls sur terre

Scan réduit 99-01-06 2 Lartigue"Le vent qui parcourt
Mes souvenirs en tous sens
Ne m'y trouve pas !"

Retiens ton chapeau, mon père !
J'ai pris la fille de l'air !

"Crayon et papier
Pour écrire aux enfants, loin,
Des mots de tendresse

Quand nous serons vieux, penchés,
Saules pleureurs, éplorés"

6-01-1999

 

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16 février 2017

M... A DISPARU !

- Ricky, voilà encore une autre voiture qui s'arrête !
- Ne t'inquiète pas, Maria, ils doivent venir rejoindre les deux autres flics là-bas au bout.
- Quand même, Ricky, tu n'es pas prudent d'avoir servi le Joop avec tous ces policiers dans le secteur.

***

Janssens arrêta la traction avant sur l'espèce de parking face au Rhin. Maigret s'extirpa avec difficulté du siège arrière où il avait commencé à somnoler.
- Arrête-toi près de ces deux-là, avait-il ordonné au chauffeur. Tu les connais, Janssens ?
- Oui, ce sont les Van Looy, ils tiennent une espèce d'épicerie-bar pour les mariniers qui descendent le Rhin.

Cartier-Bresson - 05 les Rives du Rhin dans la province de Gueldre (Pays-Bas 1956) réduite

***

- Ricky, il va falloir assurer !
- Laisse-moi faire, Maria, je m'occupe de tout.

***

Cartier-Bresson 04 Rocher-de-la-Lorelei-sur-le-Rhin-Allemagne-de-lOuest-1956A©-Henri-Cartier-Bresson-_-Magnum-Photos-720x1071

- Bonjour monsieur Van Looy. Bonjour Maria. Le commissaire français enquête sur deux... disparitions survenues dans notre village.
- Vous n'avez rien remarqué de bizarre dans le coin, ces temps-ci ? » questionna Maigret.
- Bizarre ? Disparitions ? Non.
- Il y avait des péniches arrimées ici dernièrement ?
- Des péniches ? Non.
- Mais la semaine dernière, ajouta Maria, nous avons vu un remorqueur qui tirait quatre barques avec des gens dedans.
- Ils se sont arrêtés chez vous ?
- Non.
- Est-ce qu'on peut entrer dans votre mastroquet pour boire un coup ? J'ai de nouveau très soif.
- Mais bien sûr, commissaire. Après vous.

En entrant dans la boutique, Maigret fut saisi à la gorge par les odeurs mélangées du camphre, des épices, de la bière et du café qui bouillait sur un coin du poêle dans une vieille cafetière émaillée.

- Une bière, Janssens ?
- Vous ne voulez pas plutôt goûter le schnaps, commissaire ?
- Va pour le schnaps. Dîtes moi, monsieur Van Looy, il est là depuis longtemps le petit trou dans le mur au-dessus de cette porte ?
- Ah ça, ça date de la guerre, commissaire. C'est qu'on n'a pas rigolé par ici, vous savez.
- Va donc me chercher les autres, Janssens. Nous allons perquisitionner dans votre remise, M. Van Looy. Si vous voulez bien nous donner la clé.

***

- On a trouvé deux corps, commissaire. Enterrés à la va vite. Chacun d'eux a une balle dans la peau.
- Les armes ?
- Chacun des deux hommes avait la sienne dans la poche de sa veste. Deux petits calibres de marque différente. Et...
- Et ?
- Chacun avait une balle de l'autre dans le corps. D'après les Van Looy, il s'agit d'un règlement de comptes qui a eu lieu chez eux entre deux consommateurs. Mais le plus bizarre, c'est que...

170218 Jean Richard

- Accouchez, Janssens ! Ou plutôt non. Le plus bizarre c'est l'identité des deux hommes. L'un s'appelle Jules Maigret, il est petit, un peu large d'épaules, il a des favoris, une tête de directeur de cirque et une carte de commissaire de la P.J. dans son portefeuille. L'autre s'appelle Bruno Maigret, il a les cheveux gras, des points noirs sur le nez. Je peux vous dire qu'il exerce la profession de restaurateur. Je peux même vous donner le nom de sa gargote : le Tord-boyaux. Un boui-boui bien crado à ce qu'on m'a dit !
- Alors là, vous m'épatez, commissaire ! Ce sont les deux hommes que vous recherchiez ?
- Oui.

Maigret bourra sa pipe et l'alluma. Dehors le ciel était resté du même gris plombé que depuis son arrivée aux Pays-Bas.

- Qu'est-ce que je fais pour les Van Looy, commissaire ? Leur version tient la route. Ils n'ont fait que dissimuler les corps.
- Tu me les embarques pour trafic d'EPO. C'est chez eux que le gars Bruno venait se fournir. Quand Maigret est venu l'alpaguer en flagrant délit, il lui a tiré dessus et ils ont été aussi rapides et adroits l'un que l'autre.

Le commissaire se leva et s'étira. Il était grand, trapu, le visage presque toujours immobile, la pipe plus souvent à la main qu'à la bouche.

***

 

170218 Rowan-atkinson-de-mister-bean-a-maigret

- Avant que vous ne partiez, commissaire, j'aimerais comprendre comment vous pouvez être encore vivant après avoir été tué par Bruno ?
- Mais c'est parce que je suis immortel, mon petit Janssens ! On me remplace, mon vieux ! C'est du cinéma, tout ça ! Un même rôle peut être tenu par plusieurs acteurs différents.
- Mais au départ pourtant, c'est de la littérature ?
- Bien sûr, Janssens. Mais là aussi, il y a un Maigret par livre. Avec tout ce que je bois au long d'un roman, avec tous les mélanges que je fais au cours d'une enquête, j'ai eu de quoi crever d'une cirrhose je ne sais combien de fois dans ma vie !

***

- Ricky ?
- Oui Maria ?
- La prochaine fois que tu fais de la figuration dans Télérama...
- Eh bien, Maria ?
- Juste un conseil : choisis donc une B.D. de Margerin plutôt qu'une nouvelle de Simenon !


P.S. Mes premiers écrits "internautiques" dont ce texte fait partie datent de 1998. J'ai participé alors aux forums-ateliers d'écriture de Télérama. Le premier de ceux-ci était consacré à Henri Cartier-Bresson. Il fallait écrire un texte de moins de 4000 caractères à partir d'un cliché du célèbre photographe. Il y a eu huit photos publiées au fil des semaines. Celle-ci était la cinquième et représentait "Les rives du Rhin dans la province de Gueldre (Pays-Bas) en 1956. Certains de ces textes ont vieilli mais certains me font bien rire. J'entreprends de les republier ici, les forums anciens de Télérama ayant disparu du web. 

27 mai 2015

99 DRAGONS : EXERCICES DE STYLE. 30, Pantoum

150525 077-001

Ô saint homme, délivrez-nous
De ce dragon impitoyable !
Faut-il toujours vivre à genoux
Dans ce monde à peine croyable ?

De ce dragon impitoyable
Le roi lui-même a peur la nuit.
Dans ce monde à peine croyable
Le pouvoir n’apporte qu’ennuis

Le roi lui-même a peur la nuit.
Ses chevaliers sont morts de trouille.
Le pouvoir n’apporte qu’ennuis
Mais c’est le bas-peuple qui douille.

Ses chevaliers sont morts de trouille
Vit-on jamais preux si peureux ?
Mais c’est le bas-peuple qui douille
Plaignez le sort des malheureux !

Vit-on jamais preux si peureux
Devant un monstre si vorace
Plaignez le sort des malheureux !
Et pitié pour la populace !

Devant un monstre si vorace
La princesse est la proie du jour
Et, pitié pour la populace,
Voilà qu’on la livre au vautour !

La princesse est la proie du jour
D’impuissance la foule enrage
Voilà qu’on la livre au vautour
Armez-vous, Georges, de courage !

D’impuissance la foule enrage.
Les Dieux sont-ils devenus fous ?
Armez-vous, Georges, de courage !
Ô saint homme, délivrez-nous !

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